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Concerts, spectacles… La fraude remonte sur scène

Deux sites illégaux de revente de billets ont fermé après leur condamnation par la justice. Mais l’acteur majeur du marché noir, Viagogo, sévit toujours.

Après deux ans quasiment à l’arrêt, le secteur du spectacle vivant revient sous les feux des projecteurs. Et avec lui, les sites frauduleux de revente de billets. « Dès l’automne 2021, les acteurs du marché noir sont revenus : ils annonçaient même parfois des dates de concerts avant nous », se désole Malika Séguineau, directrice générale du Prodiss, le syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variétés. Cet organisme lutte sans relâche, depuis de nombreuses années, contre ces sites dits de « second marché » qui, sous prétexte de permettre aux internautes de céder leurs places, récupèrent des tickets par d’autres moyens – comme des logiciels qui font des réservations en masse – et les affichent à des prix surgonflés, voire vendent des billets contrefaits ou qui n’existent tout simplement pas.

Afin de lutter contre ce phénomène, la France a interdit, en 2012, la vente de places sans l’accord du producteur du spectacle. Cette règle a permis aux autorités d’assainir le marché en fermant les plateformes hexagonales incriminées. En janvier dernier, Live-booker.fr et Next-concert.com ont ainsi été contraintes de mettre la clé sous la porte après une condamnation, en 2020, du tribunal judiciaire de Paris puis, début 2022, de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), qui a établi que ces sites se rendaient responsables du délit de pratique commerciale trompeuse en faisant croire à leurs clients qu’ils vendaient des tickets avec l’autorisation des organisateurs. « Ils n’avaient aucunement l’intention de trouver un business model honnête », dénonce Christophe Davy, président de la société Radical Production. La preuve, « ils proposaient même des billets pour des tournées qui n’avaient pas lieu ! » La première action contre ces deux plateformes a été enclenchée par le Prodiss. « Elle s’inscrit dans le combat que nous menons depuis longtemps contre le marché noir », précise Malika Séguineau. Avec, en ligne de mire, le leader du secteur, Viagogo, dont les victimes se comptent par centaines parmi les lecteurs de Que Choisir.

Cinq ans de procès

« Nous attendons la fin prochaine de l’instruction contre Viagogo, qui dure depuis cinq ans », indique la directrice. Installé dans l’État américain du Delaware, le site a, pour l’instant, résisté aux actions lancées individuellement par des producteurs de toute l’Europe (dont, en France, le festival des Vieilles Charrues et le tournoi de Roland-Garros). Le Prodiss estime que sanctionner Viagogo au nom de toute la profession « aurait une portée importante pour le secteur ». « Viagogo ignore clairement la législation française depuis 10 ans », s’insurge Christophe Davy. « Je ne connais aucun producteur qui lui ait donné l’autorisation de vendre des billets », poursuit celui qui est spécialisé dans le rock. Il a vu l’entreprise « proposer des tickets pour Placebo à des tarifs délirants, sans qu’[il] sache comment elle les avait obtenus ».

Aux yeux du monde du spectacle, empêcher Viagogo de nuire n’est pas seulement une question de principe. « Ces sites ne font que du parasitisme : ils captent de la valeur, mais n’investissent en rien, ne payent aucune taxe, aucun droit d’auteur, aucun impôt », résume Étienne Papin, un avocat spécialisé dans le commerce en ligne. Afin d’éviter de les enrichir et de vous faire plumer, dirigez-vous uniquement vers les billetteries reconnues (Fnac, Digitick, Ticketmaster, France Billet, grande distribution, etc.), ou sur les plateformes de revente ayant noué des partenariats officiels avec la manifestation recherchée (Zepass, TicketSwap…). Elles figurent en général sur le site de l’artiste, de l’événement ou l’affiche du spectacle.