Assurance auto : pourquoi les tarifs vont grimper en 2023
Les polices d’assurance payées par les automobilistes devraient progresser de 2 à 3 % environ l’an prochain, alors que la fréquence des sinistres n’a pas vraiment augmenté. La conjoncture actuelle, mais aussi la sophistication galopante des autos expliquent en grande partie pourquoi, une nouvelle fois, ce sera plus cher.
Les assureurs non plus ne sont pas forcément gâtés cette année : « Sur le plan climatique, 2022 est une année catastrophique », annonce Jean-Philippe Dogneton, le directeur général de la Macif. Et de dévoiler quelques chiffres. Pour cette année qui n’est pas encore achevée, la mutuelle a déjà versé 750 millions d’euros afin d’indemniser les véhicules et habitations des personnes victimes d’un orage de grêle ou de tout autre phénomène climatique violent : « C’est trois fois plus qu’une année habituelle », souligne le directeur général.
Avant même que les assureurs et leurs représentants ne commencent à faire des annonces concernant 2023, le gouvernement avait réuni tout le monde début septembre. L’objectif était d’obtenir la promesse que les tarifs des assurances ne progresseraient pas plus que l’inflation pour l’an prochain. Les assureurs, représentés par leur structure France Assureurs, s’y sont engagés, et ont même indiqué accorder « une remise de 100 € sur le contrat d’assurance auto des jeunes à la recherche d’un emploi ». La hausse ne correspondra pas non plus à une explosion des tarifs. Le comparateur Assurland pronostique une progression moyenne des prix de « 2,5 % à 3 % ».
Le prix de la technologie
Les assureurs ont donc accepté de manger en partie leur chapeau. Le directeur général de la Macif convient ainsi que le « ratio combiné » de l’activité automobile devrait être déficitaire l’an prochain, ce qui signifie que le montant des primes encaissées devrait être inférieur à celui des indemnisations versées.
Car outre les avaries climatiques, un poste de dépense grossit dangereusement : celui du prix des pièces détachées. M. Dogneton parle d’une « surinflation parce que les technologies sont plus avancées » qu’il y a quelques années. Thierry Leblanc, directeur de l’activité après-vente de Bosch France, entre dans le détail : « Plus il y a de technologie, plus c’est cher. Un rétroviseur, désormais, comporte un capteur et un moteur électrique. Cela n’a plus rien à voir avec ce que l’on connaissait il y a 10 ans ! Les balais d’essuie-glace, aujourd’hui, sont d’une longueur impressionnante, ils respectent une certaine courbure, sont quelquefois spécifiquement calibrés pour tel pare-brise… Tout a changé, y compris le prix », note-t-il.
Outre la plus grande technicité des pièces, les turbulences géopolitiques de 2022 ont aussi une conséquence directe sur l’évolution du prix des pièces détachées : « Le phénomène inflationniste découle d’une désorganisation due au Covid. Les coûts du transport maritime, notamment, ont explosé. Ils ont été multipliés par 10 à un moment donné. Pour des disques de freins, par exemple, l’essentiel de la production vient de Chine. Le prix des disques a augmenté de 20 %. Mais à ce phénomène s’est ajouté l’impact du conflit en Ukraine : ainsi, tous les produits fabriqués en Europe qui n’avaient pas souffert de la hausse du coût des transports subissent maintenant la hausse du prix de l’énergie », annonce ainsi Marc Ripotot, le directeur des achats d’Alliance Automotive Group.
Si les particuliers sont très concernés par la hausse du coût de leurs frais de chauffage, le problème est encore plus aigu pour les industriels. Stéphane Holt est le directeur général de Cora, une société spécialisée dans la distribution de pièces de carrosserie : « L’inflation sur le prix des pièces est de 7 % environ à l’heure actuelle, alors que la tendance était de +4 % chaque année jusqu’alors. Les coûts d’approvisionnement, l’énergie, tout a augmenté. Les fabricants de vitrage, par exemple, utilisent beaucoup d’énergie pour faire du verre. Ils sont très impactés par la hausse. Ils ont augmenté leurs prix et vont continuer de le faire », fait-il savoir. Et comme fait exprès, le verre est omniprésent sur les autos d’aujourd’hui : « Une Peugeot 208, c’est 20 % de surface vitrée en plus par rapport à une 206 », fait encore remarquer Jean-Philippe Dogneton, de la Macif.
Pas plus d’accidents, mais plus d’indemnités
Pièces mécaniques et vitrages plus chers, événements climatiques à répétition, tous les ingrédients semblent réunis pour que le prix des assurances s’envole. L’accidentalité n’a pourtant pas évolué par rapport à l’an passé. Entre janvier et septembre 2022, ce sont 41 618 accidents corporels qui se sont produits en France, outre-mer inclus : soit +0,4 % sur 1 an. Mais en dépit de cette stagnation, les coûts d’indemnisation des dommages corporels progressent chaque année de 5 à 7 %, selon France Assureurs.
La seule solution pour tenter de freiner la spirale des hausses est désormais de réparer les éléments plutôt que de les changer, d’utiliser des pièces d’occasion plutôt que des neuves. La loi française prévoit qu’une solution de réparation avec des pièces dites de réemploi doit être proposée à l’automobiliste. Malgré cela, seulement « 13 à 14 % » des réparations à la Macif font intervenir des éléments de réemploi, de l’aveu de son directeur. Le chemin à parcourir est encore énorme, la disponibilité de la pièce de seconde main étant sans doute le principal frein à son développement. Les équipementiers travaillent déjà largement à des gammes dites d’échange standard (pièces mécaniques partiellement rénovées) afin de proposer une offre alternative aux pièces neuves. Demain, il s’agira certainement d’aller plus loin et de donner envie aux mécaniciens de faire de la « vraie » mécanique plutôt que de changer systématiquement.