Collecte et tri des emballages ménagers : le ras le bol des collectivités locales
D’un côté les associations représentant les collectivités locales en charge de la gestion des déchets ménagers. De l’autre l’État en soutien de Citeo, l’éco-organisme responsable des emballages ménagers au nom des industriels qui les mettent sur le marché. Au centre, un conflit majeur sur le financement.
En théorie tout est cadré. Les collectivités locales étant en charge de la gestion des déchets ménagers, elles gèrent également la collecte sélective des emballages triés par les consommateurs, et ce pour le compte de Citeo (anciennement Éco-emballages), l’éco-organisme en charge de cette filière. Il est financé par les industriels qui commercialisent des produits emballés.
En contrepartie de cette collecte et de ce tri des emballages ménagers, les collectivités sont rémunérées par Citeo. Il s’agit de l’application du principe pollueur-payeur. Les industriels sont responsables de la fin de vie des emballages qu’ils mettent sur le marché et doivent donc la financer.
C’est là que le bât blesse. Un conflit majeur oppose les représentants des collectivités à Citeo et au ministère qui prend son parti. Tout l’enjeu porte sur la part de financement prise en charge par l’éco-organisme. 80 % du « coût optimisé », stipulent les textes. Un montant qui convient grosso modo aux deux parties, sauf qu’il y a de multiples façons de le calculer. Actuellement, avec l’accord de l’État, Citeo ne finance que la moitié des coûts réels, soit 825 millions sur les 1,6 milliard de dépenses effectuées par les collectivités territoriales.
« À partir de ce vrai coût des emballages ménagers, le ministère et Citeo font des calculs alambiqués pour définir un coût optimisé théorique le moins cher possible, dénonce Nicolas Garnier, délégué général d’Amorce, une association d’élus spécialiste de la gestion des déchets. À titre d’exemple, l’État retire la TVA sur la collecte sélective du calcul, il retire aussi tous les emballages mis dans la poubelle du tout-venant. » Soit tout de même 20 % du total, pour un coût de 330 millions d’euros, selon les calculs du Cercle national du recyclage (CNR), une autre association d’élus tout autant investie dans le dossier des déchets.
Mais il y a pire. « Le coût optimisé 2022 se base sur les données de l’Ademe (Agence de la transition écologique) qui datent de 2013 ou 2014 selon les postes de dépenses, il n’est même pas indexé sur l’inflation, s’insurge Nicolas Garnier. L’État se soucie beaucoup plus des metteurs sur le marché que des collectivité locales. »
Pour Amorce la coupe est pleine, de nombreuses collectivités adhérentes en ont marre d’effectuer le travail de Citeo en gardant 800 millions à leur charge. « On arrive au bout d’un modèle sur la gestion des emballages ménagers. Soit on refonde les règles pour rémunérer les collectivités locales à hauteur des coûts de la collecte sélective et du tri, soit on passe à un système privé financé à 100 % par Citeo », avertit l’association.
Certes le ministère a ajouté le soutien au nettoiement des déchets abandonnés aux missions de Citeo, pour un montant de 160 millions. « Mais la montée en puissance de ce soutien aux communes peut être étalé sur 10 ans, tempère aussitôt Bertrand Bohain, délégué général du CNR. De plus on reste loin du coût des emballages ménagers supporté par les collectivités, il s’est encore accru avec la forte inflation et la hausse de la taxe sur les déchets, qui ne sont pas répercutées dans le coût net. »