Vitesse sur autoroute :110 km/h… pour ceux qui le souhaitent !
Bien qu’il ne manque pas d’atouts, écologiques et économiques, le gouvernement a renoncé à l’abaissement à 110 km/h de la vitesse autorisée sur autoroute suggérée par des associations écologistes.
C’était une des propositions de la Convention citoyenne pour le climat dans son rapport rendu en janvier 2021. Mais c’est aussi une des trois (sur 149) écartées d’emblée par Emmanuel Macron. L’idée d’abaisser la vitesse autorisée sur autoroute à 110 km/h au lieu de 130 a refait surface ces derniers temps. Ses promoteurs avancent que la mesure permettrait de réduire à la fois les émissions de gaz à effet de serre et les dépenses des automobilistes, dans un contexte de flambée des prix du carburant. Mais le sujet est particulièrement sensible auprès de l’opinion, raison pour laquelle le gouvernement reste très réticent. Il garde en mémoire le fiasco du passage à 80 km/h maximum sur les routes secondaires, si impopulaire que de nombreux départements ont décidé de revenir dessus.
Interrogée sur BFM-TV au sujet d’un éventuel passage à 110 km/h, Élisabeth Borne a jugé que ce n’était « pas la bonne voie » car les automobilistes peuvent avoir « des contraintes de temps ». Concrètement, la mesure ferait perdre seulement 8 min tous les 100 km. Or, les automobilistes ne parcourent en moyenne que 59 km sur autoroute par trajet. Le différentiel de temps par trajet serait donc de 5 min.
16 % de gaz à effet de serre en moins
Concernant les gaz à effet de serre, de l’aveu même de Vinci autoroutes, les déplacements sur autoroute représentent, en France, plus du cinquième des émissions de CO2 du secteur des transports soit 6 % des émissions totales. D’après une étude du Cerema (établissement public spécialisé dans l’expertise sur l’aménagement du territoire et les transports), sur un même tronçon, un véhicule léger représentatif du parc national roulant à une vitesse constante de 110 km/h émet 16 % de gaz à effet de serre en moins que le même roulant à 130 km/h.
Toujours selon la même source, l’économie de carburant serait du même ordre : 16 %. Pas mal, en ces temps de pouvoir d’achat en berne. Et à ne pas négliger dans la conjoncture actuelle : en mars dernier, l’Agence internationale de l’énergie plaçait la réduction d’au moins 10 km/h des vitesses autorisées sur les autoroutes au premier rang des mesures propres à éviter une pénurie de pétrole.
Report de trafic vers des réseaux plus accidentogènes
Du point de vue de la sécurité routière, le bilan serait plus mitigé. Sur autoroute, la vitesse n’est que la quatrième cause d’accidents mortels après la prise de substances psychoactives (alcool, drogues, médicaments), la somnolence et la présence de piétons. Certes, quelle que soit la cause, les lois de la physique veulent que la force de l’impact, donc les dégâts occasionnés, augmente avec la vitesse. Mais le passage aux 110 km/h risquerait d’entraîner un report de trafic vers d’autres réseaux plus accidentogènes, en particulier les routes nationales qui ont l’avantage de la gratuité. Cependant, au total, l’impact serait positif sur le plan de l’accidentalité selon un rapport publié en 2018 par le ministère de la Transition écologique et solidaire.
Ce même rapport évalue en revanche que l’impact global de cette mesure serait négatif du fait de la perte de temps occasionnée. Mais ce type d’étude implique, pour pouvoir dresser un bilan, qu’une valeur économique soit attribuée à tout : au kg de CO2 non émis, à la minute perdue, à la vie humaine gagnée, etc. Ces attributions font l’objet de choix qui peuvent être contestables et font varier les résultats.
Rien n’empêche, en tout cas, d’adopter cette mesure individuellement, ne serait-ce que par souci d’économie, sans oublier les autres changements d’habitudes permettant de moins consommer de carburant. Ceux qui souhaitent le faire savoir et convaincre leurs contemporains de les imiter peuvent même télécharger un logo à coller sur leur pare-brise arrière sur le site Les110.org.