Avastin : amende record annulée en appel
Lourdement sanctionnés en 2020 pour avoir dénigré l’Avastin (bevacizumab), un médicament moins cher, mais aussi efficace que le leur, officiellement indiqué dans la DMLA, Novartis, Roche et Genentech viennent de voir leur amende annulée en appel.
Nouveau rebondissement dans l’affaire de l’Avastin (bevacizumab), cet anticancéreux que les médecins spécialistes de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) ont découvert par hasard en 2009 aussi efficace, et bien moins cher, que le Lucentis (ranibizumab), le médicament officiellement autorisé. La cour d’appel de Paris vient d’annuler la lourde amende (plus de 440 millions d’euros) que l’Autorité de la concurrence avait infligé il y a 3 ans à Novartis, Roche et Genentech. Les trois laboratoires, mais surtout Novartis, qui vend le Lucentis, étaient accusés d’avoir fait tout leur possible entre 2008 et 2013 pour dénigrer l’Avastin auprès des médecins, et empêcher qu’il soit prescrit dans la forme humide de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA).
Paradoxalement, Roche, en tant que fabricant de l’Avastin, aurait eu intérêt sur le papier à ce qu’il prenne l’avantage sur le Lucentis dans la prise en charge de cette pathologie, et à demander une autorisation de mise sur le marché (AMM) pour asseoir son efficacité et faciliter son utilisation. Mais il était en même temps actionnaire de Genentech, détenteur de la licence du Lucentis : le laboratoire suisse a donc préféré miser sur le Lucentis. D’autant que ce dernier bénéficiait d’un prix bien plus élevé : 1 161 € l’injection, contre 30 à 40 € la dose d’Avastin… L’Avastin est par conséquent resté hors AMM dans la DMLA.
L’Avastin reste disponible
L’argument de la cour d’appel repose sur un raisonnement simple : elle considère « qu’à compter de l’entrée en vigueur de la […] loi Bertrand [en 2011, ndlr], qui a restreint l’utilisation des médicaments hors AMM à la suite de l’affaire Mediator, l’Avastin devait être regardé comme hors marché pour le traitement de la DMLA. […] Aucun comportement d’éviction ne pouvait être reproché sur une période où l’Avastin et le Lucentis ne pouvaient se faire valablement concurrence […]. » Avant 2011, la cour d’appel estime que la présomption d’innocuité d’un médicament utilisé en dehors de son indication n’est pas du niveau de celle d’un générique, et que la communication du groupe Novartis a été « mesurée », et celle des groupes Roche et Novartis n’a été ni alarmiste ni trompeuse.
La décision de la cour d’appel ne change rien à l’utilisation actuelle de l’Avastin dans la DMLA. Depuis 2015, le médicament bénéficie d’une autorisation dérogatoire (accordée par l’Agence du médicament (ANSM), seule option permettant de contourner le refus d’un laboratoire de solliciter une AMM pour une de ses molécules.
L’Autorité de la concurrence étudie l’opportunité d’un pourvoi en cassation suite au jugement de la cour d’appel de Paris.