Bornes de recharge pour voiture électrique – Un déploiement du réseau à accélérer, des dérapages tarifaires à stopper
L’UFC-Que Choisir rend aujourd’hui publique une étude pointant les failles du déploiement du réseau de bornes de recharge et l’opacité du système de tarification, caractérisé par des prix de l’électricité excessivement variables, voire prohibitifs. En conséquence, l’UFC-Que Choisir formule une série de propositions concrètes visant à garantir une tarification juste et transparente et la cohérence du déploiement des bornes de recharge, conditions indispensables à une utilisation sereine des véhicules électriques par les consommateurs.
Le chantier du déploiement des bornes reste important
Les bornes de recharge publiques sont indispensables pour les possesseurs de véhicules électriques, d’abord pour les 37 % de ménages ne disposant pas d’un stationnement privatif et ensuite pour l’ensemble des automobilistes réalisant de longs trajets. Pourtant, l’analyse de l’UFC-Que Choisir montre le décalage entre la promotion gouvernementale des véhicules électriques et la lenteur du déploiement du réseau de bornes. En effet, l’objectif de 100 000 points de recharge déployés en 2020 n’a été atteint qu’en mai 2023. Si une accélération du déploiement a récemment été constatée, les retards accumulés mettent en péril l’objectif de 400 000 points de recharge disponibles en 2030. Selon différentes projections établies dans notre étude, entre 60 000 et 150 000 bornes pourraient venir à manquer, laissant alors entrevoir des engorgements de véhicules devant les bornes, a fortiori si la disponibilité des bornes ne s’améliore pas (39 % des bornes de recharge rapides ne fonctionnent pas en permanence).
Au-delà du nombre de bornes, l’absence d’une stratégie globale d’implantation sur le territoire laisse craindre la persistance de « zones blanches » de la recharge publique. S’il existe des schémas directeurs de développement des infrastructures de recharge de véhicules électriques ouvertes au public (SDRIVE) veillant à la coordination et la cohérence du déploiement des bornes sur un territoire, ceux-ci ne sont pas obligatoires. Cela n’est pas acceptable alors que les enjeux environnementaux appellent les consommateurs à se tourner vers les véhicules électriques les moins polluants, particulièrement en zones rurales où les alternatives à la mobilité automobile sont réduites.
Une fixation des prix de recharge répondant à des critères opaques, voire abracadabrantesques
Pour charger son véhicule électrique sur une borne accessible au public, le consommateur doit disposer d’une carte de recharge vendue par un opérateur de mobilité et permettant l’accès à l’ensemble des réseaux de bornes de recharge. Si l’itinérance est obligatoire, c’est-à-dire qu’un automobiliste peut charger son véhicule sur n’importe quelle borne quel que soit son opérateur, la multiplicité des acteurs et l’absence de règles assurant aux consommateurs la possibilité de comparer les prix laissent libre cours à toutes les aberrations tarifaires.
Certains opérateurs pratiquent une tarification à la quantité d’électricité « consommée » (kWh), d’autres y associent des frais fixes, d’autres encore des frais de stationnement. De plus, les poids de ces paramètres sont systématiquement différents d’un opérateur à l’autre. Comment un consommateur peut-il savoir si le prix d’une recharge est plus intéressant en s’abonnant à un opérateur qui tarifie à 73 % au kilowattheure (kWh) et 27 % à la minute ou à un autre qui tarifie à 51 % au kWh et 49 % à la minute ? Et comment reprocher aux consommateurs de ne même pas se poser la question quand un opérateur fixe le prix selon la formule : « 5 % de frais fixes + 65 % kWh + 30 % à la minute + frais de stationnement à partir de 2h » ? !
Des aberrations à la pelle sur la tarification appliquée aux automobilistes
Pour avoir une idée concrète des impacts de ces formules tarifaires sur les prix effectivement payés par les consommateurs, l’UFC-Que Choisir a relevé les tarifs pour la recharge d’un véhicule sur un échantillon de bornes en ville, sur route et sur autoroute. Sur une même borne, les écarts de prix peuvent être substantiels selon la carte de recharge utilisée. Par exemple, en ville, le kWh peut revenir entre 0,24 et 2,25 € selon l’opérateur, soit un écart de 830 %. Ces différences tarifaires marquées entre opérateurs sont constatées sur l’ensemble des bornes analysées et aboutissent à un yoyo tarifaire pour un « plein » d’électricité. Ce dernier peut être multiplié par neuf ! Par exemple, sur une borne lente à Lyon la recharge d’une Peugeot e-208 vous coûtera entre 7,35 € et 68,77 € selon l’opérateur (ce dernier « plein » étant près de 10 fois plus cher qu’à domicile !).
Au vu de ces constats, l’UFC-Que Choisir, soucieuse d’un déploiement cohérent des bornes de recharge et de stopper les dérapages tarifaires, demande :
- Un cadre obligatoire de déploiement des bornes de recharge accessibles au public sur tout le territoire à destination de la mobilité quotidienne et de la mobilité longue distance, en sacralisant et généralisant les schémas directeurs dédiés ;
- Un affichage obligatoire, harmonisé et accessible des tarifs de la recharge électrique pour l’ensemble des bornes publiques ;
- L’accès au paiement par carte bancaire sur l’ensemble des bornes accessibles au public pour ne pas contraindre les consommateurs à passer par un opérateur de recharge ;
- L’ouverture des données sur l’ensemble des prix pratiqués sur toutes les bornes de recharge du territoire.