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Sécurité sanitaire – Les déodorants Nuud retirés du marché

Kystes douloureux, surinfections bactériennes : les autorités sanitaires ont reçu plus de 150 signalements au sujet des déodorants de cette marque confidentielle. Qui n’a répondu de façon convaincante à aucune de nos questions.

« N’utilise plus de déodorant, utilise Nuud ! » Le slogan de cette marque néerlandaise, apparemment convaincue que le tutoiement fait vendre, prête le flanc au détournement. « N’utilise plus Nuud », est-on tenté de corriger. Car l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a obtenu le retrait du marché de ses déodorants. Une démarche, très rare pour un produit cosmétique, motivée par la remontée de « 158 signalements dont 30 graves », selon l’agence. Elle explique que « des utilisateurs de ce déodorant ont fait état d’effets indésirables tels que des kystes douloureux au niveau des aisselles, parfois accompagnés d’une infection traitée par des antibiotiques. Dans la plupart des cas déclarés, les kystes ont disparu après l’arrêt de l’utilisation du produit ou la prise des traitements prescrits ». En cause, non pas tel ou tel ingrédient en particulier mais la formule particulièrement grasse qui « favoriserait l’obstruction des pores des aisselles avec la possibilité d’une surinfection microbienne, par un effet occlusif ».

Allégations sans preuves

Paradoxal quand le site, dont la page d’accueil assure en gros caractère « totalement inoffensif », expose longuement le mal qu’il faut penser des antitranspirants, précisément parce qu’ils bloquent les orifices des glandes sudoripares et empêchent la production de transpiration. Nuud serait « meilleur pour la peau car il la laisse plus tranquille ». Au-delà de ce fâcheux effet d’occlusion, le discours a de quoi laisser perplexe. Se vantant d’avoir rendu « plus de 3 millions d’aisselles heureuses » (sic), le fabricant explique que son produit n’est pas un déodorant mais un « préodorant » car il bloque les bactéries responsables de l’odeur. Mieux, « plus tu utilises Nuud longtemps, moins les bactéries reviennent et plus tu peux espacer les applications ». Intrigués par ce mode de fonctionnement inédit, nous avons demandé les preuves de ces allégations aux responsables de l’entreprise.

Malgré un délai de réponse confortable, ils ne nous ont pas fourni le moindre élément probant. Pire, ils nous ont servi des arguments complètement bidon, se contentant de citer les données de vente qui selon eux prouvent que « l’utilisateur moyen l’utilise une fois tous les 5 jours ». Alors qu’on peut évidemment émettre une autre hypothèse : le produit déçoit et on le réserve aux jours où l’on n’a pas un besoin impérieux de déodorant, pour alterner avec d’autres. Même interprétation hâtive sur l’évolution des achats : « Le décalage entre le troisième et le deuxième achat est 11 % plus élevé qu’entre le premier et le deuxième. » D’après Nuud, c’est la preuve que le corps s’habitue peu à peu et que l’on transpire de moins en moins ! Oserait-on suggérer que c’est peut-être la preuve que les consommateurs sont de moins en moins convaincus et utilisent de moins en moins souvent le produit ? D’ailleurs, notre interlocuteur s’est bien gardé de nous fournir le nombre de clients « perdus de vue » mais nous suggère de consulter les avis Google qui devraient nous convaincre de l’efficacité de son produit…

Nanoparticules

Même légèreté concernant un des ingrédients, l’argent, utilisé pour ses propriétés antibactériennes. Le site explique longuement pourquoi « l’argent contenu dans Nuud est cool ! » (re-sic). Mais on sait que, bien souvent, ce composant se trouve à l’état nanoparticulaire avec toutes les interrogations que cela implique concernant son innocuité. Nous avons donc demandé le certificat prouvant que ce n’était pas le cas de son ingrédient. Pour toute garantie, nous avons reçu… un courrier du fournisseur d’argent. Soit un document sans aucune valeur alors que nous attendions, bien sûr, un bulletin de contrôle par un laboratoire indépendant.

Enfin, le diable se cache dans les détails : sur le site de la marque, il est indiqué que les produits sont « épuisés » (voir photo). « Indisponibles » serait plus juste. Car un client qui se rendrait directement sur cette page via un moteur de recherche pourrait penser que tous ces merveilleux « préodorants » ont été victimes de leur succès. Et tenter, comme il est suggéré à demi-mot, d’acheter tout de même sur les sites Internet d’autres pays !

Nuud
Sur son site, Nuud indique habilement que son produit est épuisé.