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Alimentation – Les ventes de bio reculent à nouveau

Après la baisse amorcée en 2021, les ventes en bio ont encore reculé en 2022 en raison de leur image de produits chers. En adoptant les bonnes stratégies, il est pourtant possible de continuer à manger des produits certifiés.

La crise se confirme. Après avoir montré des premiers signes d’essoufflement en 2021, les ventes de produits alimentaires bio ont à nouveau reculé de 4,6 % en 2022, selon l’Agence bio. La chute est particulièrement marquée sur les viandes (-13 %), le rayon traiteur (-8 %), et les fruits (-7 %). « Ce qui est alarmant, c’est que la part des produits bio dans le panier des Français a baissé », analyse Laure Verdeau, directrice de l’agence. Sur 1 an, la part du bio dans le panier des Français est tombée à 6 %, quand elle atteint par exemple 13 % au Danemark.

Après 10 ans de croissance rapide, ce sont les crises sanitaires et géopolitiques en chaîne qui ont déclenché l’orage de l’inflation. Alors que l’inflation atteindrait environ 9 % entre janvier 2022 et avril 2023 dans les rayons bio tous produits confondus, le prix de notre panier type bio a augmenté de 18 % sur la même période. La hausse reste néanmoins inférieure à un panier conventionnel équivalent (+23 %) (voir graphique ci-dessous).

En plus de l’inflation, agriculteurs et experts pointent aussi les stratégies de la distribution généraliste. « HVEZéro résidu de pesticides : on met en avant dans les rayons beaucoup de labels moins-disants qui ressemblent à du bio », rappelle Adrien Weitzman, directeur au sein du cabinet d’étude Good. Autre coup dur : les enseignes ont réduit le nombre de références bio dans les rayons (-8,5 % sur 1 an, selon le panéliste IRI/Circana). « Le développement du bio s’est fait grâce aux distributeurs, mais maintenant qu’il y a un problème de pouvoir d’achat, ils préfèrent mettre en avant leurs marques propres », regrette le président de l’Agence bio et éleveur laitier Loïc Guines.

Certains nouveaux labels ont un cahier des charges beaucoup moins exigeant que celui du bio.

Plus grave, notre étude de 2019 qui pointait les surmarges des distributeurs sur les fruits et légumes frais bio serait toujours d’actualité. « Certaines enseignes ont le réflexe de baisser les marges sur les produits achetés par les clients les plus sensibles au prix, pour se rattraper sur des produits destinés aux foyers plus aisés, comme le bio », confirme Fabien Foulon, consultant au sein du cabinet Retail&Detail.

LES POMMES DE TERRE BIO MOINS CHÈRES QUE LES CONVENTIONNELLES

Les magasins spécialisés bio comme Biocoop ou Naturalia souffrent davantage. Entre 2021 et 2022, leur chiffre d’affaires a baissé de 9 %, et 200 magasins ont fermé leurs portes. L’hémorragie, qui semble se poursuivre en 2023, ne devrait cependant pas créer de zone blanche bio. « On observe plus de fermetures dans les zones de centre-ville, où les magasins étaient déjà nombreux », analyse Adrien Weitzman.

Ces magasins, malgré leur image chère, peuvent pourtant proposer des tarifs intéressants sur des fruits et légumes de saison. Il coûte par exemple aujourd’hui environ 10 % moins cher d’acheter ses pommes ou poireaux bio dans un supermarché spécialisé que chez un généraliste, selon l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer). Et les pommes de terres bio y affichent même un prix légèrement inférieur au conventionnel. À l’inverse, ces circuits restent moins compétitifs sur les produits animaux tels que les œufs ou le lait. « Attention à ce que l’on compare : le bio français peut être plus cher que du bio importé », nuance Adrien Weitzman.

PROGRESSER DANS LES CADDIES ET DANS LES CHAMPS

Le ralentissement des ventes n’encourage pas les producteurs à se convertir. Les surfaces agricoles certifiées bio ont stagné à 2,9 millions d’hectares entre 2021 et 2022, soit environ 11 % de la surface totale. Les agriculteurs risquent donc d’avoir du mal à fournir les étals quand le marché reprendra sa croissance. Et la demande devra alors être couverte par des importations.

« Le point clé, c’est de soutenir à la fois l’offre et la demande », analyse Christophe Barnouin, président du groupe agroalimentaire bio Ecotone (Bjorg, Bonneterre). Côté consommation, les grands acteurs de la transformation et de la distribution bio, réunis sous la bannière de la Maison de la bio, ont proposé au gouvernement d’appliquer une TVA réduite à 0 % sur les produits labellisés. La crise pourrait aussi être l’occasion de s’inspirer de l’exemple danois, « avec des politiques plus volontaristes en matière d’éducation à l’école ». Côté production, il s’agit enfin de renforcer les soutiens « pour préserver l’une des filières bio les plus structurées d’Europe ». Car le cahier des charges de ce label contribue aussi à préserver notre santé, la biodiversité et la qualité de l’eau.

Les pistes pour manger bio sans dépenser plus

  • Dans les enseignes spécialisées, rechercher les promotions : « Prix bas » chez Naturalia, « Prix engagés » chez Biocoop ou « Les essentiels de la bio » chez l’Eau Vive.
  • S’approvisionner en circuits les plus courts possibles. Notre enquête montre que, pour les fruits et légumes frais, les prix en bio y sont moins élevés qu’en grande surface conventionnelle.
  • Privilégier les fruits et légumes de saison.
  • Éviter au maximum les produits transformés.
  • Privilégier les protéines d’origine végétale, moins onéreuses que les produits animaux.