Prix des produits : les astuces des fabricants
Les produits de consommation courante coûtent de plus en plus cher à produire. Comment répercuter ces hausses sur les consommateurs sans qu’ils s’en détournent ? Les fabricants cèdent parfois à la tentation de glisser un peu moins de produit dans le paquet… Voici quelques-unes de leurs astuces.
Downsizing, shrinkflation, cheapflation… Ces anglicismes barbares recouvrent une même réalité : comment nous faire payer plus cher notre alimentation ou nos produits ménagers, à notre insu ? Les fabricants ont recours à diverses astuces pour cela. La plus simple consiste à mettre moins d’aliments dans un paquet, tout en conservant le même prix (ce qui revient à augmenter le prix au kilo) : c’est le downsizing ou shrinkflation – certains utilisent le néologisme « réduflation » – largement évoqué dans les médias ces temps-ci. La cheapflation consiste quant à elle à remplacer des ingrédients par des substituts de moindre qualité, donc moins coûteux, tout en maintenant là aussi le prix du produit.
Des pratiques qui restent marginales
Si ces pratiques contestables existent de longue date, elles restent marginales, y compris en cette période d’inflation. C’est ce que montre notre enquête, menée en octobre, qui corrobore plusieurs rapports : sur 110 000 produits de marques nationales vendus en drive en 2021 et 2022, le downsizing ne concernerait en réalité que quelques dizaines de références.
Citons le Fanta orange, dont le volume est passé de 1,5 à 1,25 l (une baisse de 17 %) d’une année sur l’autre, alors que le prix au litre a augmenté de 19 %. C’en est fini de « l’offre du moment » pour le guacamole « extra » de Blini, dont la barquette perd 5 g et tombe à 175 g, alors que le prix au kilo grimpe de 27 %. Toujours pour l’apéro, les Doritos Sweet Chili Pepper maigrissent de 20 g (soit – 8 %) pour tomber à 230 g, alors que leur tarif s’arrondit de 33 % ! Le changement ? Un paquet au graphisme légèrement différent… Pour Barilla, réduire le paquet de tagliatelles aux œufs de 500 à 450 g ne pose aucun souci : il y a davantage de « mâche » car les pâtes sont plus épaisses, et une famille de 4 personnes est aussi bien calée avec 450 g qu’avec 500 g. L’argument est pourtant un peu léger, pour justifier 10 % de poids en moins !
Une montée en gamme qui se répercute… sur la quantité
Mais il existe d’autres techniques marketing pour nous faire débourser davantage au kilo ou au litre à notre insu. Une nouvelle version plus qualitative ou plus éthique d’un produit (amélioration de la recette, de l’efficacité ou du flacon) justifierait une hausse du prix au kilo. Mais les industriels y sont réticents : augmenter les tarifs risque de faire fuir les consommateurs, surtout dans le contexte actuel d’inflation. Mieux vaut maintenir le prix affiché et escamoter quelques grammes de produit dans un emballage inchangé.
Ainsi, la barquette de margarine demi-sel de Planta Fin passe de 510 à 500 g après la suppression de l’huile de palme de la recette. La Vache qui rit fait également le ménage dans sa liste d’ingrédients, pour ne conserver que 4 ingrédients, contre 8 auparavant, grâce à la suppression des additifs. Mais elle perd aussi 4 % de son poids, tombant à 256 g, tandis que le prix au kilo prend 11 %. Même démarche pour le Tendre Croc’de Herta, qui passe au sans nitrite et maigrit de 10 g (200 g contre 210 g dans la version précédente) pour un tarif gonflé de 23 %. La nuance est parfois subtile, avec une légère modification des proportions des ingrédients, à l’instar des barres glacées Mars : la part de lait parmi les ingrédients passe à 17 % cette année, contre 15 % en 2021. En parallèle, les barres s’allègent de 2 g…
Pour d’autres produits, c’est un emballage amélioré qui justifie la discrète réduction de la quantité de produit. Le Sanex 0 % gel douche peaux sèches passe ainsi de 500 à 475 ml. Seul changement : l’emballage est désormais 100 % recyclé. Tandis que la bouteille de Saint-Marc nettoyant ménager Forêt des Landes voit son profil légèrement modifié pour réduire le volume de 20 %, en passant de 1,25 à 1 l. Le motif : une formule plus concentrée.
Certes, certaines évolutions vont dans le bon sens, mais jouer sur la quantité pour faire croire à un prix stable laisse une désagréable impression d’imposture. Règle no 1, vérifiez les prix au kilo ou au litre, y compris pour les promotions !